venerdì 5 giugno 2009

J. Fontanille - Soma et Séma: agape - l'ékphrasis - la scène peinte


A l'ombre des jeunes filles en fleures, Marcel Proust (M.Proust, Paris, Gallimard, 1954, p. 229-230)

[...] Ce voyage, on le ferait sans dout aujourd'hui en automobile, croyant le rendre ainsi plus agréable. On verra qu'accompli de cette façon, il serait même, en un sens, plus vrais puisqu'on y suivrait de plus près, dans une intimite plus étroite, les diverses gradations selons lesquelles change la face de la terre. Mais enfin le plasir spécifique du voyage n'èst pas de pouvoir descendre en route et s'arrêter quand on est faitigué, c'est de rendre la difference entre le départ et l'arrivée non pas aussi insensible, mais aussi profonde qu'on peut, de la ressentir dans sa totalité, intacte, telle qu'elle était en nous quand notre imagination nous portait du lieu où nous vivions jusqu'au coeur d'un lieu désiré, en un bond qui nous semblait moin miraculeux parce qu'il franchissait une distance que parce qu'il unissait deux individualités distinctes de la terre, qu'il nous menait d'un nom à un autre nom, et que schématise (mieux qu'une promenade où, comme on débarque où l'on veut, il n'y a guère plus d'arrivée) l'opération mystérieuse qui s'accomplissait dans ces lieux spéciaux, les gares, lesquels ne font presque partie de la ville mais contiennent l'essence de sa personnalité de même que sur un écriteau signalétique elle portent son nom.
Mais en tout genre, notre temps a la manie de vouloir ne montrer les choses qu'avec ce qui les entoure dans la réalité, et par là de soupprimer l'essentiel, l'acte de l'esprit qui les isola d'elle. On " présente " un tableau au milieu de meubles, de bibelots, de tentures de la même époque, fade décor qu'excelle à composer dans les hôtels d'aujourd'hui la maîtresse de maison la plus ignorante la veille, passant maintenent ses journée dans les archives et les bibliothècques, et au milieu duquel le chef d'oeuvre qu'on regarde tout en dînant ne nous donne pas la même enivrante joie qu'on ne doit lui demander que dans une salle de musée, la quelle symbolise bien mieux, par sa nudité et son dépoillement de toutes particularités, les espaces intérieure où l'artiste s'est abstrait pour créer.
Malheuresement ces lieux merveilleux que sont les gares, d'où l'on part pour une destination éloignée, sont aussi des lieux tragiques car si le miracle s'y accomplit grâce auquel les pays qui n'avaient encore d'existence que dans notre pensée vont être ceux au milieu desquels nous vivrons, pour cette raison même il faut renoncer, au sortir de la salle d'atteinte, à retrouver tout à l'heure la chambre familière où l'on était il y a un instant encore. Il faut laisser toute espérance de rentrer coucher chez soi, une fois qu'on s'est décidé à pénétre dans l'antre empesté par où l'on accède au mystere, dans un de ces grands atelier vitrés, comme celui de Saintes-Lazare où j'aillais chercher le train de Belbec, et qui déployait au-dessus de la ville éventrée un des ces immenses ciels crus et gros des menaces amoncelées de drame, parails à certains ciels, d'une modernité presque parisienne, de Mantegna ou de Véronèse, et sous lequel ne pouvait s'accomplir que quelque acte terrible et solennel comme un départ en chemin de fer ou l'érection de la Croix.
[...]

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